LA GRENADE
'LA GRENADE" /rec. LI Songfu ; adapt. Xiaoding ; ill. ZHONG Shuheng. - Les livres du Dauphin, 1989
D'après une vieille légende populaire, il était une fois, deux frères germains qui habitaient dans une chaumière délabrée à côté du village.
Leur seul bien était un boeuf, très aimé par le frère cadet qui faisait de l'herbe pour lui chaque jour.
Un jour, comme il rentrait chez lui, le frère aîné lui dit : "Mon frère, te voilà déjà grand, nous allons nous séparer".
Ces paroles ont fait du mal au frère cadet, mais enfin il fut bien obligé d'accepter car son frère y était décidé.
Celui-ci ajouta : "Mon petit frère, laisse-moi le boeuf"
Le frère cadet n'aurait pas voulu se séparer du boeuf, mais il savait bien qu'un seul boeuf ne pouvait être divisé ; d'ailleurs, sur les deux, il y en aurait toujours un qui subirait une perte ; il laissa donc son frère enmener le boeuf.
Le boeuf nemené par son aîné, il ne reste au cadet qu'un qu'un taon du boeuf. Ce dernier était fidèle et docile à son maitre, et le petit frère l'aimait de tout son coeur.
Un jour chez l'oncle, à cause d'une imprudence, le taon est mangé par le coq et le petit frère pleure, le coeur brisé.
La tante lui demande la raison de ses pleurs ; le petit frère de répondre : "Mon frère a voulu que nous nous séparions et il a enmené le boeuf ; j'ai eu bien du mal a obtenir le taon, et voilà qu'il est mangé par le coq."
La tante le console : "Ne pleure pas, je te donne mon coq" C'était un coq bigarré et le petit frère s'attacha beaucoup à lui. Ils devinrent bons amis.
En hiver, sous le vent violent et les chutes de neige la chaumière du petit frère s'écroula, et il est obligé d'aller chez un vieux voisin, enportant son coq, pour s'abriter de la neige.
Quel malheur! Cette fois-ci, le coq est mangé par le chien jaune du vieux. Le coeur déchiré, le petit frère a longtemps pleuré.
Le vieux lui demande la raison de ses pleurs : "Mon coq a été mangé par votre chien jaune, dit-il entre deux sanglots" Le vieux le console : "Ne pleure pas, je te donne mon chien jaune".
Le petit frère sèche ses larmes et rentre chez lui abec le chien jaune.
L'hiver est passé, les paysans ont commencé à labourer et à semer. Seul le petit frère demeure tout soucieux.
Le petit chien jaune qui comprend ses sentiments lui dit gentiment : "Puisque tu n'as pas de boeuf, laisse-moi labourer les champs" Le petit frère est tout surpris que son chien jaune puisse parler et soit capable de labourer.
Le lendemain matin, le chien jaune est allé aux champs suivi du petit frère. Il a labouré plus vite que des boeufs. Le petit frère suant de fatigue le suivait tout essoufflé.
Ayant apris cette nouvelle, le grand frère est venu voir le cadet en amenant le boeuf. Il lui demande avec insistance de changer le boeuf contre le chien jaune et le petit frère fut obligé d'accepter.
Le lendemain, de beau matin, le grand frère est allé aux labours avec le chien jaune. Malgré les injures et les coups, le chien jaune ne voulait pas travailler. Alors le grand frère entra dans une telle colère que le chien jaune finit par obéir et dut labourer toute la journée ; à la fin, il tomba mort de fatigue.
Quand il vit son chien jaune mort, le petit frère très affligé creusa un trou pour l'enterrer et lui éleva un tertre sur lequel il planta un grenadier.
Le petit frère, chaque jour, va voir le grenadier, l'arrose, bêche la terre, arrache l'herbe, le débarrasse des insectes. L'arbre grandit très vite, et au bout de quelques jours, il est chargé de fruits.
Un jour, une grenade se détache, le petit frère se précipite et la reçoit dans ses deux mains. Le fruit se fend lentement et devient de plus en plus lourd.
Le petit frère le pause avec précaution par terre ; miracle! La grenade rouge est devenue une belle maison.
Etonné et joyeux, le petit frère y entre et voit qu'elle est bien meublée et pleine de bonnes choses à manger.
Le petit frère, tout content, se dépêche d'aller dire au grand frère : "Mon frère, je voudrais partager toutes ces grenades entre les pauvres qui n'ont pas de maison ; tu es d'accord?"
Le grand frère s'est mis en colère et a crié bien fort : "Pourquoi donner tous ces trésors aux pauvres? Ne vaut-il pas mieux les garder pour nous?"
Le petit frère de répliquer : "Si nous les partageons avec les pauvres et leur rendons la vie plus agréable, ne serait-ce pas bien?" Mais le grand frère n'écoute aucun conseil et rumine son plan.
La nuit même, legrand frère s'en va en cachette, un sac sur l'épaule, à la tombe du chien jaune. Il cueille toutes les grenades et les met dans son sac.
De retour chez lui, il étale toute sa récolte et jubile en pensant qu'il va devenir un richard.
Il choisit la plus grosse grenade qui se fend lentement ; il s'en envole un taon.
Peu après, les taons deviennent de plus en plus nombreux et le piquent au visage.
Le grand frère tâte son visage blessé et se dit : "Ce premier fruit n'est pas bon, la belle maison sera peut-être dans le deuxième." A ces mots, il soulève le deuxième.
La deuxième grenade se fend lentement, pas de belle maison, un petit coq saute hors du fruit.
Il lance d'abord un cocorico, puis il saute sur la jambe du grand frère, lui donne des grands coups de bec et s'envole.
Le grand frère grimace sous le coup de la douleur, puis il se dit : "Cette grenade n'est pas bonne non plus, c'est la troisième qui contient sûrement la belle maison."
Et il prend la troisième qui se fend lentement ; il en sort un chien jaune.
Le petit chien haune aboie vers le grans frère. A la vue du chien qu'il avait tué à la tâche, le grand frère, saisi de peur, s'évanouit.
Quand il reprend connaissance, toutes les grenades rouges ont disparu et il n'a rien trouvé.