JEUNE PATRE TCHAOLOU
"LE JEUNE PATRE TCHAOLOU" /texte de Kiang Nan ; ill. de Han Chou-yu Ed. en langues étrangères, 1964
Né dans les steppes de Mongolie intérieure, le jeune Tchaolou est déjà un pâtre habile à 15ans.
Il faisait particulièrement beau ce jour-là, il n'y avait pas un souffle de vent. Des nuages blancs floconnaient là-haut, le soleil faisait briller les herbes de la steppe. Un chameau à la bride et son chien l'accompagnant, Tchaolou menait paitre 400 moutons de la commune populaire dans la prairie. Il chantait. Les moutons broutaient à ses côtés et de temps à autre levaient la tête pour faire "bé, bé!".
Sans s'en apercevoir, Tchaolou conduisit son troupeau plus loin que d'habitude. Le temps est capricieux dans la steppe. L'après-midi le vent se leva d'un coup, les nuages noirs s'amassèrent et s'épaissirent.
Tchaolou se dit : "Malheur, voilà la tempête de neige!" Il prit le chemin du retour en toute hâte, tirant le chameau et aiguillonnant de la voix ses moutons : "Khacouyi, Khacouyi!" Le chien aboyait, trottait autour du troupeau, aidant le berger.
Hélas ils n'étaient pas bien loin que le vent se mit à souffler en furie, la neige voltigeait, tourbillonnait. La steppe n'était plus qu'étendue blanche, même la piste ne se voyait plus. Pressés flanc contre flanc, les moutons couraient sous le vent.
Tchaolou savait qu'une fois la tempête déchainée, le troupeau courrait sans arrêt sous le vent. Si le vent souffle un jour, les moutons courent tout le jour ; s'il souffle deux jours, ils courent aussi longtemps. Il devait les suivre à tout prix pou les protéger.
Mais où s'arrêteraient-ils dans cette steppe sans fin? Tchaolou n'est pas un lâche, il ne permettra pas que se perde le bien de la commune. Tirant le chameau, il suivait de près, criait sans arrêt : "Khacouyi, Khacouyi !" Le chien se démenait dans tous les sens, aboyant, aboyant. Il était la seule aide de Tchaolou dans la tempête.
Il faisit tout à fait noir. A la réverbération de la neige, Tchaolou suivait inlassablement ses mouton qui n'étaient plus qu'une ombre filant droit devant lui. Ses mains étaient gelées et son visage était devenu glaçon.
Combien d'heures avait-il couru? Il l'ignorait. Mais il s'aperçut tout à coup qu'il avait perdu son chien. "Comment affronter ls loups sans le chien?" L'idée le terrifia. Il se dit aussi : "Rentrer à la maison? Non! C'est impossible, je ne puis abandonner mes moutons!" La décision prise, il eut un peu plus chaud et la force lui revint.
La tempête redoublait de violence, la neige tombait toujours. D'abord mouillés par la sueur, les vêtements de Tchaolou entravaient maintenant sa marche, le vent glacial les ayant gelés et raidis. Ses jambes étaient deux morceaux de bois.
Il avançait malgré tout, en se dandinant. Tout à coup, ses jambes se dérobèrent, il tomba dans la neige, la longe échappa à sa main gelée et le chameau s'en alla. Tchaolou demeura là un long moment, mais voyant les moutons s'éloignant toujous sous le vent, il se dit : "Je ne peux pas rester ici, je dois suivre!" Il fit appel à toute son énergie pour se relever et se mettre e route.
Il fut debout puis retomba, et cela plusieurs fois de suite. Gelé, affamé, il parvint cependant à ne pas abadonner le troupeau.
Soudain, il y eut de la lumière devant lui, le vent faiblit, les nuages noirs disparurent, la neige cessa de tomber. Il regarda, les yeux écrquillés. Quelque chose remuait au loin. Il approcha en serrant les dents et découvrit des vaches. "Bonheur! Il y a certainement quelqu'un qui les garde! Et voilà mon chameau!".
Il voulut crier sa joie, mais ses lèvres gelées s'y refusèrent. Tout devint noir, il tomba et s'évanouit dans la neige.
Il s'éveilla et se sentit couché dans une yourte. Un vieillard était assis à son chevet et lui servait du thé chaud au beurre. Les premiers mots de Tchaolou furent : "Mes moutons?" Le vieillard le rassura, les 400 moutons étaient sains et saufs et déjà en lieu sûr. Il lui dit aussi de ne pas se tourmenter.
C'est en menant paître les vaches que le vieillard avait trouvé Tchaolou dans la neige, et il l'avait porté jusque dans sa yourte.
Les camarades de la commune populaire étaient partis à la recherche du jeune Tchaolou et ils rencontrèrent le messager envoyé par le vieillard. Ils furent bientôt là. Heureux de retrouver leur pâtre, ils l'embrassèrent : "Petit Tchaolou, tu es un vrai brave de notre steppe!".